Sept mois après la publication du premier volet du 6ème rapport du GIEC consacré aux connaissances scientifiques sur le changement climatique, les chercheurs ont étudié les risques climatiques ainsi que le niveau d’adaptation des sociétés.
Publié en août 2021, le premier volet du rapport revenait sur la compréhension physique du système et du changement climatique. Le nouveau volet du rapport aborde davantage l’interconnexion entre la nature, le climat et les populations. Il est consacré aux impacts déjà observables ou à venir de la crise, et les adaptations pour lutter contre. Le groupe d'experts ne s'intéresse donc plus uniquement aux efforts à faire mais propose des solutions. Malheureusement, cette publication est passée inaperçue dans le contexte chaotique de l'actualité internationale et de la guerre en Ukraine.
Des aléas climatiques inévitables
Le monde sera confronté à de multiples aléas climatiques inévitables au cours des deux prochaines décennies avec un réchauffement de 1,5 °C. Les effets du réchauffement climatique dépassent déjà les seuils de tolérance des plantes et des animaux. Selon le Giec, entre 3 et 14% des espèces terrestres sont menacées d'extinction, même si le réchauffement est limité à 1,5 degré.
Quatre risques majeurs ont été déterminés : la hausse des températures, la baisse de la production agricoles, la pénurie d'eau, et les inondations. De façon générale, le réchauffement du climat a des conséquences sur "l'agriculture, les précipitations extrêmes, les ressources en eau, la biodiversité, les vagues de chaleur", énumère Gonéri Le Cozannet (Chercheur au BRGM, co-auteur du rapport).
« Les demi-mesures ne sont plus une option »
La fenêtre de tir est limitée : si éviter le réchauffement climatique n'est plus possible, il nous reste à le limiter et s’adapter au maximum. "Ce nouveau rapport montre que s’adapter est possible pourvu que le réchauffement soit limité à 1,5-2 °C. Et tout délai supplémentaire pour atténuer le changement climatique limitera nos options d’adaptation et compromet l’avenir", résume Nathalie Hilmi, du Centre scientifique de Monaco et coautrice du rapport.
Le GIEC note que des progrès en termes d’adaptations, planifiées ou mises en œuvre, ont été observés, mais l’écart entre ce qui est fait et ce qui reste à faire reste toutefois trop important, et "les demi-mesures ne sont plus une option", insiste-t-il. Une action ambitieuse et accélérée est nécessaire pour s'adapter au changement climatique.
Des conséquences très importantes et irréversibles pour l’agriculture
Ce dernier rapport du GIEC souligne l’immense fragilité du secteur agricole qui doit se réinventer pour répondre à l’impératif de sécurité alimentaire des populations : nouveaux comportements des plantes et des animaux, multiplication et intensification des aléas climatiques : orage, sécheresse, etc. Il nous faut repenser les fondements de l’activité agricole telle que nous les avons pensés depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale.
Les scientifiques notent qu'"on ne fait aujourd'hui pas les mêmes récoltes que celles qu'on fera demain", "les agriculteurs sèment et récoltent plus tôt, et voient les changement des ressources en eau". Même dans un monde à faibles émissions de gaz à effet de serre, c'est à dire un réchauffement inférieur à 1,6 °C d'ici 2100, "8 % des terres agricoles actuelles deviendront climatiquement inadaptées d'ici 2100" précise le rapport.
L'agriculture doit être refondée
Afin d'adapter l'agriculture pour faire face au changement climatique, le GIEC présente un ensemble de solutions appelé "développement climatique résilient". Cela passe par une alimentation saine issue d'une agriculture durable. Le rapport préconise notamment d'améliorer les systèmes agricoles et d'engager des changements dans les pratiques. "Les agriculteurs peuvent accroître la résilience climatique de leurs entreprises en diversifiant leurs cultures et leur élevage, en plantant des arbres et des arbustes sur les champs pour l'ombrage et la fumure organique (agriculture agroécologique)". Depuis 1950, 70 % des haies ont été détruites pour augmenter la productivité des fermes françaises. La profession agricole doit apporter des réponses et penser une trajectoire d’adaptation dans des délais très courts, une réponse d’une ampleur inédite.
La tête de réseau a à coeur de contribuer à la diffusion de ces solutions via un rôle de courroie de transmission. Démultiplier les publics touchés, donner à voir la multiplicité des expériences qui assoie la crédibilité de nouvelles pratiques, nous nous devons d'informer les professionnels sur les mutations à engager pour conserver une agriculture résiliente face au changement climatique. Les problématiques climatiques et environnementales grandissantes doivent pousser le monde agricole à mieux prendre en compte ces biens communs que sont l’eau, l’air, les sols et la biodiversité. Un renouvellement en profondeur de nos connaissances et pratiques agricoles est inévitable. Ces nouvelles pratiques doivent avoir des impacts neutres à positifs sur l’eau, l’air, les sols et la biodiversité.