Quand un cédant et son réseau permettent l'installation de deux porteurs de projet et de sauver une ferme !
C'est avant tout une histoire de transmission. La ferme de la Cousinière (à Antoigné dans la Vienne) a été gérée durant 30 ans par Xavier Choisy, jusqu’à sa retraite fin 2018. Ce dernier a transmis sa ferme à un jeune couple en reconversion professionnelle. Malgré une transmission réussie, l'installation s'est heurtée à un ensemble de difficultés obligeant le couple à jeter l’éponge au bout d’un an d’activité. En mars 2019, le tribunal de commerce de Poitiers prononçait la liquidation judiciaire de la société qui gérait la ferme, désignant un mandataire pour liquider les biens. Faute de repreneur à l’horizon, la disparition définitive de cette activité maraîchère était bien réelle. Impensable pour la famille Choisy et pour Raymond Demiot (agriculteur, syndicaliste et militant associatif et ancien client de Xavier.)
Au cours de l’été 2019, ces derniers décident de lancer une souscription, en s’appuyant uniquement sur leurs réseaux de connaissance, sans aucune publicité extérieure. Objectif : réunir environ 40.0000 € pour pouvoir formuler une offre de reprise des actifs de la ferme.
Rapidement, 75 souscripteurs acceptent de mettre la main à la poche. Et fin 2019, la somme est atteinte et l’offre de reprise transmise. En janvier 2020, celle-ci est validée par le tribunal de commerce de Poitiers. L’association Soutenons des installations en agriculture paysanne (Siap), qui réunit les 75 souscripteurs, est créée et devient propriétaire des biens de la Cousinière : matériel de travail du sol, forage, réserve d’eau, serres…
Parallèlement à cette quête, Raymond Demiot s’était mis à la recherche d’exploitants futurs. Rapidement, il avait ciblé le profil d’un couple désireux de reprendre une petite exploitation maraîchère, Johanna et Éric.
En février 2020, les deux parties tombent d’accord : le couple de quadragénaire s’installe à la Cousinière. La ferme a repris vie le 1er mars dernier après dix-huit mois d’arrêt total d’activité. Ces nouveaux paysans ont donné naissance aux Jardins de la Cousinière. Le couple a commencé ses premières ventes de légumes en mai et la saison estivale a été excellente.
L’association s’était engagée à les soutenir dans la remise en état des terres et des bâtiments, malheureusement les chantiers participatifs initialement prévues n’ont pu avoir lieu du fait du COVID. Néanmoins les membres agriculteurs de l’association sont venus effectuer une partie du travail du sol, et les souscripteurs ont été sollicités pour aider à la récolte des oignons et des pommes de terre.
L’association leur a fait crédit des actifs de la ferme jusqu’en janvier 2021, date à laquelle le couple s’engage à rembourser 15.000 € (somme qui correspond à l’achat du matériel, le foncier sera racheté à l’indivision). L’association refermera alors le chapitre de la Cousinière… pour en rouvrir un autre dès que possible. « Nous serons à l’affût de nouveaux projets de reprise que nous pourrions soutenir. »
« En cas de cessation d’activité agricole (retraite, reconversion ou liquidation), il n’y a pas un délai suffisant pour organiser la reprise. C’est un vrai souci pour le maintien d’une agriculture paysanne. Nous avons besoin de structure collective de portage temporaire d’exploitation, qui, dès lors qu’une cessation d’activité serait identifiée, pourrait prendre le relais en attendant de trouver des repreneurs. La ferme de la Cousinière a été l'occasion de mettre en place cet outil. C’est une ferme maraîchère historique de Châtellerault, qui avait une belle réputation, proposait de beaux produits en bio, s’appuyait sur un bon réseau de consommateurs… Mettre un point final aurait été une vraie déception ! » Raymond Demiot
